TU ES NE POUR LE BONHEUR ( (15/16)
[Extrait de l'Œuvre de Paul Scortesco (1960)]
CHAPITRE II LES BÉATITUDES (SUITE 2ème partie)
LA DOCTRINE DU CHRIST, C'EST LA DOCTRINE DU
BONHEUR.
Tous nos échecs et nos malheurs proviennent du refus d'accepter les lois du bonheur proposées par Dieu même : les huit Béatitudes. Prodigieux retournement des valeurs humaines !
Le Christ est venu pour ceux qui souffrent.
Il fréquentait, en particulier, les « gens sans importance », qui passent aux yeux du monde pour les plus souffrants, les truands, les prostituées, les mendiants ; ils avaient besoin plus que les autres d'être libérés des mirages et apparences de ce monde.
La souffrance surnaturellement transfigurée :
-« Bienheureux ceux qui pleurent »...
Bonheur qui ne vient pas de la chair ni du monde, mais du dedans.
De Dieu en nous.
Malheur radical de notre temps : la joie ne peut plus jaillir de la vie intérieure :
-« Toute la beauté de la fille du roi est au-dedans » (Ps. XLIV, 16).
C'est notre âme, la fille du roi ! Qu'en avons-nous fait ?
-Une mendiante qui attend, au coin des rues, les passants qui pourraient lui offrir une aumône ; nous attendons tout du dehors !
« Bienheureux serez-vous lorsque l'on vous insultera, lorsque l'on vous persécutera, et lorsque l'on dira toute sorte de mal contre vous à cause de moi, en mentant. Soyez dans la joie et dans l'allégresse »...
Si ce n'est pas de la vie intérieure illuminée par la grâce, d'où vient ce total renversement des valeurs ? Quelle preuve flagrante de la victoire de l'Esprit !
Art de vivre authentiquement et uniquement chrétien : n'avoir pas peur des adversités. Les offrir à Dieu et en tirer une joie : Imitation de la Croix qui n'est pas aimée pour elle-même mais comme instrument de perfection.
La douleur offrande a perdu sa force de destruction. Elle est joie puisqu'elle est amour. Art de vivre complètement perdu aujourd'hui.
Ne pas se prendre au sérieux, garder le sens de l'humour, être gai de se savoir le dernier des derniers !
Exulter quand les pires coups s'abattent sur vous ou sur votre œuvre ; vivre toujours dans la joie en se crucifiant pour Jésus : « GAUDETE SEMPER » !
Autant de traits qui appartiennent au vrai chrétien.
Le secret du bonheur : être content et joyeux quoiqu'il arrive, car rien n'arrive sans la permission de Dieu.
Pour être heureux il faudrait que rien ne s'oppose à notre volonté.
Or, il n'existe qu'une seule volonté à laquelle rien ne s'oppose : la divine Volonté. Ayons donc cette volonté et nous serons heureux ; celui-là donc possède le bonheur dont la volonté est conforme à celle de Dieu.
On peut éprouver en cette vie même le commencement de la béatitude céleste : elle prend ici-bas la forme des huit béatitudes terrestres :
*bienheureux ceux qui ne sont pas riches et comblés parce qu'ils ne s'endorment pas ; *bienheureux les pauvres qui portent la croix parce qu'ils se tiennent éveillés et seront ressuscites.
Satan veut nous faire croire, comme à Jésus lui-même, que la béatitude du ciel commence sur la terre par la possession des richesses de ce monde. Nous aurons garde de nous laisser égarer :
-« Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous. Heureux vous, qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés. » (Luc ; VI, 20).
Qu'attendons-nous de la terre ?
-Les moyens d'y être purifiés, d'y devenir ce que nous sommes, de nous préparer à être reçus au ciel par le Christ qui est déjà au sommet de notre âme et de ressusciter avec Lui.
Le reste n'est qu'illusion !
Tous les messianismes collectivistes ne sont que des hallucinations, ils veulent nous faire croire que, dans l'avenir, le malheur et la misère seront bannis de la terre !
Or, lorsqu'on prêche les Béatitudes on n'annonce pas un avenir prestigieux de la société, on annonce un maintenant divinisé, une union de l'âme à Dieu et à notre prochain, un maintenant vécu dans un amour purifié, tellement amour qu'il en est béatitude.
Et c'est alors, par surcroît, une cité plus humaine.
Le Christ n'est pas venu pour briser les chaînes de la servitude, mais pour nous insuffler le pouvoir surnaturel de les rendre plus légères, — tellement légères qu'elles nous soulèvent au lieu de nous écraser...
« Bienheureux les pauvres en esprit »...
Ne plus vivre par soi mais de la vie même du Verbe incarné ; se vider de soi pour être rempli par l'Esprit de Dieu : pauvreté qui mène à la plus sublime des richesses !
Hélas, pour un homme atteint de cécité spirituelle, c'est être réellement pauvre que de vivre et raisonner en s'appuyant sur le Sacré.
Aveuglement fondamental que de croire à la richesse de la révélation des sens et à la pauvreté de la Révélation de Dieu !
Identification d'amour avec Dieu dans les ténèbres... Ton avoir fait écran ! Enlève-le ! Et alors les ténèbres se changent en opulente et éblouissante Lumière !
Ta vie, ô homme moderne, est un refuge contre toi-même. Pour ne pas permettre à Dieu de te dépouiller de tout ce qui est en toi et n'est pas toi !
« Bienheureux les pacifiques, car ils seront appelés enfants de Dieu »...
Nul n'est malheureux par les événements, mais par sa réaction envers les événements : si cette réaction est une acceptation souriante et paisible, tout est joie ; si elle est haineuse et violente, tout est souffrance.
« Enfants de Dieu »... Nous sommes créés pour aimer Dieu et devenir des saints de Dieu, — « en dansant de joie devant l'Arche du « Seigneur » !
Que ce terme de saint ne nous effraie pas !
Que l'on ne croie pas que la sainteté soit l'évocation d'un idéal inaccessible !
Sans rapport avec le réel !
Ne l'ai-je pas démontré tout au long de ce livre : le « réel » ne s'écroule-t-il pas quand disparaît le sens du Sacré ?
Toutes les civilisations ne se sont-elles pas effondrées, chaque fois qu'elles se sont éloignées du Sacré ?
Bien au contraire : est irréaliste toute société qui perd de vue le destin de l'homme, qui ne l'aide pas à l'atteindre : devenir un enfant de Dieu, être à l'image de Dieu !...
Sans cela, on n'y trouvera dans le monde que de la veulerie, de la lâcheté, de l'anxiété, du malheur !
Ah non ! Ce n'est pas un « idéal inaccessible »... Pour devenir un enfant de Dieu, on n'a qu'à dompter le vieil homme, source de tous les écroulements.
Et pour y parvenir, se dire comme saint Cottolengo :
-« Dieu me voit », et voir ensuite Dieu en tout et en tous...
Pour s'approcher de la sainteté, se répéter aussi souvent que possible les paroles de saint Bosco : « Sainte Marie, mère de Jésus, faites de moi un saint ! »
Il faut savoir demander, savoir prier ; car de même que le corps, pour grandir, assimile une nourriture qui appartient au milieu, l'âme, pour s'épanouir, doit recevoir une nourriture qui lui vient d'un autre « Milieu »...
Les âmes qui ne prient pas, ne se nourrissent pas.
Les hommes qui ont perdu le sens de la prière et qui considèrent que l'action est le seul moyen de parvenir à leurs fins, se surmènent, se vident d'eux-mêmes, victimes d'une hémorragie morale perpétuelle.
La déperdition de substance spirituelle compromet l'existence même de l'humanité : elle se meurt d'inanition, — et vogue à pleines voiles comme le radeau de Méduse, cap au malheur total.
On se plaint que le bonheur est chose rare… Mais combien d'hommes désirent-ils devenir des saints ? Or, il n'y a pas de bonheur véritable hors de la sainteté. C'est l'état des « BIENHEUREUX ».
C'est l'état de ceux qui veulent vivre la doctrine de la joie, les Béatitudes :
-« Bienheureux ceux qui»... Et, en effet, ils sont heureux...
Le bonheur est l'apanage de ceux qui veulent vivre en Dieu, de ceux qui se rappellent les paroles de Dieu :
-« Moi en eux, mon Père en moi ». Point d'autre Bonheur !
Dieu nous a donné sa vie afin que nous échappions à la mort et sa mort afin que nous ayons la vie ; quand on a vécu cela, non compris mais vécu, on ne peut être que dans le ravissement...
A SUIVRE
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